Parole de l’Évêque – Tous engagés pour la paix des mots
Paru dans Église en Ille-et-Vilaine n°374 – Juin 2025
Plusieurs fois, le pape Léon XIV a évoqué l’intelligence artificielle. Il a choisi son nom en pensant à Léon XIII qui, au XIXe siècle lors de la révolution industrielle, a proclamé la dignité des travailleurs. Or, souligne Léon XIV, avec le développement de l’intelligence artificielle, nous sommes devant une nouvelle révolution industrielle. Celle-ci va-t-elle engendrer la paix ?
Cette préoccupation habite le cœur du Pape. On se souvient de son tout premier mot lorsqu’il est apparu sur le balcon de Saint-Pierre, le 8 mai au soir. Laissant deviner son émotion devant la foule qu’en silence il saluait, il dit la parole de Jésus ressuscité : « La paix soit avec vous. » Quelle force dans ce premier mot ! Il n’a pas commencé par parler de lui en disant qu’il venait des USA ou du Pérou !
Quatre jours plus tard, devant les journalistes, il revient sur la paix : « « Heureux les artisans de paix » (Mt 5, 9). Il s’agit d’une béatitude qui nous interpelle tous… » Mais le Pape a précisé aussitôt : « … et qui vous concerne particulièrement, appelant chacun à s’engager à promouvoir une communication différente, qui ne recherche pas le consensus à tout prix, qui ne se revêt pas de mots agressifs, qui n’épouse pas le modèle de la compétition, qui ne sépare jamais la recherche de la vérité de l’amour avec lequel nous devons humblement la rechercher. La paix commence par chacun de nous : par la manière dont nous regardons les autres, dont nous les écoutons, dont nous parlons d’eux ; et, en ce sens, la manière dont nous communiquons est d’une importance fondamentale : nous devons dire « non » à la guerre des mots et des images, nous devons rejeter le paradigme de la guerre. »
Nous le savons bien, le pouvoir des mots peut être mortifère. Jésus condamne avec netteté la médisance : « Moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère devra passer en jugement. Si quelqu’un insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite de fou, il sera passible de la géhenne de feu. » (Mt 5,22)
Léon XIV poursuit : « Nous vivons des temps difficiles à traverser et à raconter, qui représentent un défi pour nous tous et que nous ne devons pas fuir. Au contraire, ils exigent de chacun, dans nos différents rôles et services, de ne jamais céder à la médiocrité. […] Comme nous le rappelle saint Augustin, qui disait : « Vivons bien, et les temps seront bons. Nous sommes les temps » (Discours 311). »
Oui, les temps sont difficiles ! En plus des guerres semant la mort des innocents, on voit se dérouler sous nos yeux le drame de la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, souvent promus par les médias, alors que la violence ne cesse pas de croître en nos villes ! Il nous est bon d’entendre Léon XIV :
« Aujourd’hui, l’un des défis les plus importants est de promouvoir une communication capable de nous faire sortir de la « tour de Babel » dans laquelle nous nous trouvons parfois, de la confusion des langages sans amour, souvent idéologiques ou partisans. C’est pourquoi votre service, avec les mots que vous utilisez et le style que vous adoptez, est important. »
« Et si l’on considère l’évolution technologique, cette mission devient encore plus nécessaire. Je pense en particulier à l’intelligence artificielle, avec son immense potentiel, qui exige toutefois responsabilité et discernement pour orienter les outils vers le bien de tous, afin qu’ils puissent produire des bénéfices pour l’humanité. Et cette responsabilité concerne tout le monde, proportionnellement à l’âge et aux rôles sociaux. »