Être confirmé avant de communier
Prêtre du diocèse de Nanterre, curé de paroisse, l’abbé François Dedieu plaide dans son livre "La confirmation à sa juste place" pour que le sacrement de confirmation soit reçu avant la première communion. C’est pourtant ce que l’Église recommande, explique-t-il à Aleteia. Pourquoi l’Esprit saint ne bousculerait-il pas nos habitudes ?
Est-il nécessaire qu’un baptisé reçoive le sacrement de la confirmation ? Certains imaginent peut-être qu’il s’agit ici d’une question posée par saint Thomas d’Aquin dans sa fameuse Somme théologique. Un observateur attentif objectera que, puisque plus de la moitié des baptisés ne sont pas confirmés, c’est que la confirmation ne doit pas être indispensable à la vie chrétienne. Il ajoutera aussi que la tendance à repousser, ici ou là, l’âge à partir duquel on peut recevoir ce sacrement révèle que l’on peut très bien vivre des années sans être confirmé. Il relèvera aussi que dans tel ou tel diocèse les adultes baptisés à Pâques ne sont pas confirmés au cours de cette nuit : ils peuvent donc mener leur vie chrétienne sans être confirmés ! Cependant, le Catéchisme de l’Église catholique précise qu’il « faut expliquer aux fidèles que la réception de ce sacrement est nécessaire à l’accomplissement de la grâce baptismale » (CEC, 1285). Nécessaire, dit le Catéchisme.
Baptisés pour mourir… confirmés pour vivre !
Les Pères de l’Église aiment dire que nous sommes baptisés pour mourir et confirmés pour vivre. La formule est pour le moins abrupte ! Nous avons reçu la vie divine au baptême pour pouvoir mourir en paix, sauvés, car il nous ouvre à la Vie éternelle. Nous recevons l’Esprit saint à la confirmation pour pouvoir vivre ici-bas en chrétiens, selon le chemin de l’Évangile dans toute son exigence, sans ne devoir compter que sur nos maigres forces. C’est bien un extraordinaire cadeau que Dieu nous fait : l’Esprit saint en personne ! Il tient avec chacun de nous la promesse qu’Il a faite aux apôtres : « Vous recevez l’Esprit saint ! »
L’Esprit saint est cette perche qui nous est offerte par Dieu Lui-même pour atteindre les sommets de la vie chrétienne.
Le Seigneur semble quelquefois mettre la barre bien haut dans son Évangile, au point que nous risquons soit de nous décourager soit d’entrer dans un volontarisme fait d’efforts acharnés. Nous oublions qu’il ne s’agit pas tant de saut en hauteur que de saut à la perche, et que l’Esprit saint est cette perche qui nous est offerte par Dieu Lui-même pour atteindre les sommets de la vie chrétienne. Allons-nous nous passer de la grâce de l’Esprit saint ?
Que l’Esprit saint nous bouscule dans nos habitudes !
Nous avons un besoin vital de la présence de l’Esprit saint pour avancer sur notre route de disciples, non pas au terme d’un long parcours spirituel déjà accompli, mais dès nos plus jeunes années, dès que nous sommes capables de poser des actes pleinement conscients et responsables. C’est pour cela que l’Église propose de recevoir le sacrement de confirmation à tout âge à partir de l’âge de raison, et surtout avant la première communion. Nous nous réjouissons tant, à raison, que le saint pape Pie X ait permis l’accès à la communion aux jeunes enfants dès cet âge, pourquoi alors leur refuser l’accès aux dons de l’Esprit saint ?
C’est une proposition qui peut surprendre, voire dérouter, quand on repense à son propre itinéraire chrétien ! Il est vrai que les chrétiens adultes qui ont reçu le sacrement de confirmation avant leur première communion sont actuellement rares, mis à part les catéchumènes baptisés à Pâques, eux-mêmes confirmés et communiants en principe dans la même nuit. Il est très difficile de sortir du schéma que nous avons vécu, d’autant plus que le Seigneur nous a heureusement comblés de son Amour, même à travers d’autres chemins ! Le sacrement de confirmation a pu être une étape particulière dans notre histoire. La tentation est forte d’imaginer que d’autres devraient vivre la même démarche que nous, non pas simplement dans le sens où ils devraient recevoir le sacrement de confirmation, mais où ils devraient le recevoir à l’âge, ou la période de notre vie, où nous l’avons reçu. Il nous faut absolument sortir de notre vécu personnel — nous laisser bousculer par l’Esprit saint — pour laisser à Dieu la possibilité d’agir comme Il le veut dans le cœur de chacun, sans négliger le fait que c’est l’Esprit saint reçu à la confirmation qui dispose notre âme à être entièrement donnée au Christ dans l’eucharistie. Non seulement l’Esprit saint travaille en nous pour qu’avec la grâce de Dieu nous puissions dès le plus jeune âge mener une vie authentiquement chrétienne en déployant au quotidien la morale de l’Évangile, mais Il travaille encore notre âme pour la sanctifier et la présenter dans la communion à son Époux « resplendissante, sans tache ni ride, ni rien de tel, mais sainte et immaculée » (Ep 5,27).
Vers un renouveau pastoral
Le sacrement de confirmation n’est pas la médaille décernée à celui qui a traversé les affres de l’adolescence, ou le tampon accordé à celui qui veut s’engager dans l’Église et confirmer la foi de son baptême. C’est Dieu qui vient confirmer le baptisé par ce don, le Don de Dieu, l’Esprit saint Lui-même. La confirmation est ainsi le parachèvement du baptême. Elle est le porche de l’eucharistie. Approfondir ce qu’est le sacrement de la confirmation peut susciter un renouveau pastoral et provoquer une plus grande disponibilité à l’action de l’Esprit saint tant dans nos communautés que dans chacune de nos vies. La vie chrétienne n’est rien d’autre que la vie dans l’Esprit. Il serait bien dommage de vivre sans Lui, de ne pas nous laisser conduire par Celui qui nous est donné dans le si nécessaire sacrement de la confirmation.
Aleteia, François Dedieu - publié le 23/01/24