Musiques sacrées : le chant grégorien

La musique grégorienne vient spontanément à l’esprit lorsque l’on songe aux chants anciens de l’Église catholique, ces chants qui dans l’ambiance feutrée et calme des abbayes s’élèvent, sans instruments, pour lancer à Dieu des louanges et des actions de grâces séculaires.

Lorsque saint Augustin emploie le terme cantare dans ses écrits, ce dernier désigne le chant ecclésiastique proprement dit, alors que celui de musica fait référence à la science musicale héritée des Grecs anciens. Aussi, le cantus ecclesiasticus, réunissant notamment les chants liturgiques du Moyen Âge, inclura-t-il, le chant grégorien, ainsi nommé en raison du pape Grégoire 1er le Grand. Soulignons, cependant, que si ce pape a certes laissé son nom au VIe siècle en raison de sa riche action pour la place de la musique dans la liturgie, il ne saurait cependant être considéré comme le fondateur même du chant grégorien. L’origine de ce dernier est plutôt à rechercher au VIIIe siècle, entre la Loire et le Rhin, lorsque l’Église puisait encore à l’ancien héritage laissé par les premières liturgies chrétiennes, notamment pour les  chants ecclésiastiques déclamés tout au long de l’année liturgique. Le latin sera la base première du grégorien, et au milieu du VIIIe siècle, Pépin le Bref, en adoptant la liturgie romaine, encouragera largement la diffusion de ces chants issus des traditions anciennes, chants dont les mélodies ne sont pas encore à cette époque consignées par écrit.

           

Le chant des monastères

Ce sera Charlemagne au IXe siècle qui sera le principal vecteur de diffusion du grégorien dans toute la chrétienté à partir des multiples monastères qui fleurissent à cette époque. Le XIe siècle connaîtra, lui, une innovation des plus importantes avec l’introduction de la portée permettant de consigner les notes de musique. Cette nouveauté majeure permettra une meilleure et plus large diffusion des mélodies grâce notamment au travail important d’un moine italien, nommé Guido d’Arrezzo, qui eut l’heureuse idée de placer des signes (appelés neumes) sur des lignes parallèles.

Il faudra attendre le XIXe siècle pour que soient restaurés l’esprit et la pratique du chant grégorien.

Le chant grégorien deviendra ainsi tout au long du Moyen Âge l’une des musiques sacrées les plus chantées, et sera considéré comme le chant des monastères, avant son déclin progressif jusqu’à la Renaissance. Il faudra attendre le XIXe siècle et la remarquable action de Dom Guéranger pour que soient restaurés l’esprit et la pratique du chant grégorien à partir d’un impressionnant travail mené sur les sources à l’Abbaye Saint-Pierre de Solesmes, aujourd’hui véritable conservatoire du chant grégorien.

           

Une ligne monodique

Comment caractériser, cependant, sur le plan musical le chant grégorien ?  La chose n’est certes pas aisée, le mieux demeure peut-être de le comparer à la polyphonie qui lui succédera à la fin du Moyen Âge. En effet, à la différence de la musique polyphonique où plusieurs lignes mélodiques se mêlent et s’entrecroisent, le grégorien est, en revanche, chanté sur une seule ligne mélodique. Ce chant porté à Dieu et déclamé à l’unisson ne peut dès lors pleinement se comprendre sans  le contexte liturgique dans lequel il s’inscrit.
À l’image du plus beau calice serti de pierres précieuses et ciselé par les meilleurs orfèvres, le chant grégorien est intrinsèquement dépendant de la transcendance qu’il glorifie dans la liturgie. Ainsi, est-il important de savoir que le recueil de chants grégoriens, dénommé Graduel, rassemble-t-il pour sa part les pièces destinées à la célébration de la Messe, alors que  l’Antiphonaire réunit, quant à lui, les chants pour la Liturgie des Heures (Office divin) célébrée sept fois la journée et une fois la nuit tout au long de l’année par les religieux. Au-delà de ces subtilités, reste que le chant grégorien demeure, encore aujourd’hui, un chant divin largement apprécié et porté avec ferveur par de nombreux monastères et ensembles de musique.

            

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