67ième sermon de Saint Pierre Chrysologue


Pierre Chrysologue — WikipédiaVous avez prêté attention à l’exposé de la foi, écoutez maintenant une explication de l’oraison dominicale. Le Christ a enseigné à prier en peu de mots, Lui qui veut accorder promptement ce qu’on demande. Que ne donnera-t-Il pas à ceux qui Lui demandent quelque chose, Celui qui s’est donné Lui-même à ceux qui ne le demandaient pas ? Ou quel retard mettra-t-Il à répondre celui qui prévient les désirs et les demandes en dictant les prières ? Ce que vous allez entendre aujourd’hui stupéfie les anges, émerveille le ciel, époustoufle la terre. La chair ne le tolère pas, l’oreille ne le capte pas, l’esprit ne le saisit pas, la créature entière ne peut le supporter. Je n’ose pas le dire, mais je ne puis pas me taire. Que Dieu vous accorde à vous de pouvoir l’entendre, et à moi, de pouvoir le dire ! Qu’est-ce qui est le plus extraordinaire ? Que Dieu se soit donné à la terre, ou qu’Il vous donne au Ciel ? Que Lui-même entre en association avec la chair, ou qu’Il vous fasse entrer en participation avec la divinité ? Qu’Il ait Lui-même assumé la mort, ou qu’Il vous ait soustrait à la mort ? Qu’Il ait pris sur Lui votre pauvreté, ou qu’Il fasse de vous ses héritiers, ses uniques cohéritiers ? Y a-t-il quelque chose de plus renversant que la terre soit transférée dans le ciel, que l’homme soit mué en la déité, et que le sort de la servitude et de l’esclavage obtienne du sort les droits de la domination et de la suprématie ?. Mais bien que cela soit redoutable, puisque ce n’est pas celui qui enseigne qui en porte la responsabilité, mais Celui qui ordonne d’enseigner, accédons, mes fils, là où la charité nous appelle, où nous attire l’amour, où nous invite l’affection. Que les cœurs expérimentent la présence de Dieu le Père, que la voix résonne au loin, et que tout ce qu’il y a en nous réponde à la grâce, non à la crainte. Car Celui qui a changé le Juge en Père, veut être aimé, non craint.

Notre Père qui es aux cieux. (Matt.V1) Quant tu dis cela, ne l’entends pas au sens où Il ne serait pas sur la terre. Ne va pas penser qu’Il est enfermé dans un lieu, Lui qui renferme tout, mais comprends que tu tires ton origine du ciel, et que ton Père est céleste. Et fais en sorte qu’une vie sainte réponde à la sainteté de ton Père. Il prouve sa filiation divine celui qui n’est pas avili par des vices humains, celui chez qui commencent à luire les vertus divines. Que ton nom soit sanctifié. Celui dont nous sommes la progéniture, reconnaissons-le aussi par le nom. Nous prions donc pour que son nom qui par lui-même et en lui-même est saint soit sanctifié en nous. Car le nom de Dieu est honoré par nos bonnes actions ou blasphémé par nos mauvaises. Ecoute l’Apôtre qui dit : Le nom de Dieu à cause de vous est blasphémé chez les nations. Que ton règne vienne. Et quand donc Dieu n’a-t-Il pas régné ? Nous demandons donc que Celui qui a toujours régné pour Lui-même règne maintenant en nous, pour que nous puissions nous aussi régner en Lui. Le diable a régné, le péché a régné, la mort a régné, et la mortalité a été longtemps captive. Nous demandons donc qu’à la venue du règne de Dieu, le démon obéisse, le péché disparaisse; que la mort meure, que la captivité soit capturée, pour qu’une fois affranchis, nous puissions régner dans la vie perpétuelle. Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. C’est le royaume de Dieu quand sur la terre et au ciel, il n’y a plus qu’une seule volonté : celle de Dieu. Quand la Sagesse de Dieu est dans tous les hommes, c’est alors que Dieu agit, que Dieu vit, que Dieu règne. Dieu est tout, selon le mot de l’Apôtre : Que Dieu soit toutes choses en vous tous !
Donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien. Celui qui s’est donné à nous comme Père, qui nous a adoptés pour Lui-même comme ses fils , qui nous a fait héritiers de la création, qui nous a ennoblis en nous faisant porter son nom, qui nous fait participants de son honneur et de son règne, c’est le même qui approuve que nous demandions notre pain quotidien. Que cherche la pauvreté humaine dans le royaume de Dieu, parmi les dons divins ? Un père si bon, si compatissant, si généreux n’accorderait le pain à ses fils que dans la mesure où ils l’en supplient ? Mais que dire alors de cette parole de Jésus : Ne vous inquiétez pas de ce que vous mangerez, ni de ce que vous boirez, ni de quoi vous vous vêtirez. Il ordonne de demander ce dont Il nous défend de nous préoccuper, jusqu’à ce que le Père céleste nous exhorte nous, ses fils célestes, à demander le pain du ciel. Car c’est Lui-même qui a dit : Je suis le Pain descendu du ciel. Il est le Pain qui a été semé dans le sein de la Vierge, qui a fermenté dans la chair, qui a été pétri dans la passion, cuit dans la fournaise du sépulcre, conservé dans les églises, offert sur les autels, et qui assure à chaque jour aux fidèles la nourriture céleste. Et remettez- nous nos dettes comme nous remettons à ceux qui nous doivent. Homme, si tu ne peux pas être sans péché, et si tu veux toujours qu’on te remette tout ce que tu dois, remets toujours aux autres ce qu’ils te doivent. Toutes les fois que tu veux qu’on te remette ce que tu dois, remets aux autres ce qu’ils te doivent. Homme, comprends qu’en pardonnant aux autres tu t’accordes à toi-même le pardon. Et ne nous induis pas en tentation. La vie dans le siècle est à elle seule une tentation. La tentation est le lot de l’homme. Demandons donc que notre Père ne nous abandonne pas à notre libre arbitre, mais que dans toutes nos actions Il nous serre paternellement la main, et qu’Il nous maintienne dans le chemin de la vie avec une patience céleste. Mais délivre- nous du mal. De quel mal ? Du diable, sans aucun doute, de qui vient tous les maux. Demandons d’être libérés du mal, car celui qui ne s’est pas privé du mal ne peut pas jouir du bien.

Si ceux qui ne sont pas encore nés, qui se développent dans le sein de leur mère, demandent déjà du pain, attendent déjà le règne, pourquoi se demander à quoi s’occupe constamment le Fils de Dieu dans le sein mystérieux du Père ? Si l’église engendre, il n’y a pas à en chercher la raison, c’est un mystère céleste. Que le Fils de Dieu ait été dans le Père, Il ne l’est pas à la façon dont le conçoit la raison humaine. Les choses divines ne doivent pas être considérées à la façon humaine. Tu as entendu le mot Dieu, ne va pas penser à quelque chose de terrestre ou d’humain. Tu as entendu " le Père du Christ ", crois qu’Il est Fils par nature. Tu as entendu que Dieu est ton père. crois qu’Il l’est par grâce. Il a toujours été en état d’avoir un Fils. Mais c’est tout récemment qu’Il t’a donné d’être fils. Sache donc être fils sans cesser d’être serviteur. Comprends que tu as été rétabli à la ressemblance du Christ, de façon à toujours te souvenir que tu es le sujet du Christ.

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